7ème dimanche depuis le début du confinement.

Bonjour à tous. La situation que nous connaissons aujourd’hui nous interroge sur ce que peut-être la vie en société. Nous avons appris que le simple fait de se croiser, de se saluer, d’échanger quelques mots, nécessite que nous prenions quelques mesures de précaution pour éviter de transmettre ou d’être touchés nous-mêmes par un virus redouté. En peu de temps, nous nous sommes rendu compte que nous ne vivons plus la proximité de la même façon, et que nous devons considérer le quotidien avec plus d’attention. Les médias ne cessent de nous rappeler quotidiennement des mises en garde sur la nécessité de se laver les mains, d’éternuer ou tousser dans le creux de notre coude, porter un masque, être vigilants sur quelques symptômes révélant le Covid 19… et consulter le cas échéant.

Tout ceci est criant de vérités oubliées dans un monde où, depuis plusieurs décennies, et dans nos sociétés industrialisées, nous vivions avec une certaine légèreté ; nous pouvions aller et venir librement, facilement… Pensions-nous à la fragilité et à la valeur de cette liberté ? Aujourd’hui, cette liberté de mouvement, de circulation, de se réunir, même de prévoir des voyages, est entravée, limitée, ou carrément interdite et beaucoup de projets sont reportés en attendant des jours meilleurs. Même si ces conditions sont annoncées comme provisoires, elles n’en sont pas moins vécues difficilement, et nous donnent l’impression que ce n’est pas notre monde, notre monde rêvé.

En lien avec cette nécessaire distanciation, cet isolement pour beaucoup, et ce qui change dans notre façon de voir la vie, je voudrais dire que Dieu n’est pas absent dans les conditions présentes et mentionner deux petites phrases de la bible que j’ai trouvées en tête d’une méditation écrite dans un journal chrétien français daté d’octobre 1941. Cette date situe le contexte dans lequel ce journal paraissait : celui de la seconde guerre mondiale et de l’occupation de la France par un ennemi redoutable. Autrement dit, un temps extrêmement difficile, douloureux, où beaucoup ont craint pour leur vie, la vie de leurs proches, où beaucoup sont morts de cette guerre. Voici ces deux phrases qui ont été mises côte à côte par l’auteur de cette méditation :

« Il renvoya la foule (Matthieu 13-36) … Je vis seul cette grande vision (Daniel 10-7».

Jésus renvoie une foule de gens venus près de lui. Le second texte nous dit l’isolement d’une personne seule à voir ce que d’autres, pourtant présents, ne voyaient pas… Cela ne trouve t’il pas un écho dans ce que nous vivons aussi aujourd’hui ?

La distanciation fortement recommandée ressemble à une dispersion forcée par les événements. Et si, de ce temps où le lien d’humanité est éprouvé un peu plus, Dieu désirait que nous tirions quelque leçon ? Dans ces moments de distanciation, quelle vision de la vie développons-nous ? Notre vision de la vie est-elle éclairée de l’Evangile ?

La crainte de la contamination, qui n’est pas imaginaire, nous conduit à faire plus attention à notre façon de vivre… Cette épidémie a sans doute apporté une donnée nouvelle à prendre en compte pour notre vie : Veiller sur soi-même, prendre soin de nous pour finalement préserver autrui. Cette considération morale a une correspondance qui n’est pas étrangère à la vie spirituelle des croyants, de ceux et celles qui pensent que la foi en Dieu s’accompagne d’une manière de vivre : faire le bien et fuir le mal.

Une petite réflexion concernant le péché, un mot marginalisé, tombé en désuétude, mais dont le sens nous conduit à ce que nous vivons aujourd’hui : « garder ses distances ». Beaucoup souffrent de ne pouvoir se rencontrer, s’asseoir à une même table, s’accueillir… Il faut garder ses distances… L’éloignement devient souffrance, car il y a interdiction, tout au moins une forte recommandation. L’éloignement de Dieu conduit à la souffrance, celle d’une distance qui ne permet pas une bienfaisante communion, une distanciation à laquelle nous n’avons rien à gagner. Entre Dieu, notre Père Céleste, Créateur des cieux et de la terre, et nous, c’est une très ancienne histoire d’amour : Amour de Dieu pour nous (que nous venons de redire lors de la fête de Pâques), rendu visible dans le sacrifice consenti par Jésus. De notre péché, de tout ce qui nous tient éloigné de Dieu, Jésus s’est chargé, nous assurant que nous pouvions nous approcher de Dieu sans crainte, et vivre ainsi une communion. Notre avenir en Jésus-Christ, pour reprendre une image familière et tirée de l’évangile, c’est de nous trouver ensemble assis à une même table, celle d’un festin préparé auquel nous sommes conviés :

« J’ai préparé mon festin, …tout est prêt, venez aux noces » Matthieu 22-4.

Suis-je isolé ? Suis-je seul à avoir cette « vision » ? Voudrions-nous ouvrir les yeux sur cette réalité oubliée, négligée, et posséder tel un éclairage nouveau sur notre vie, cette clarté de l’espérance que Jésus-Christ est venu nous faire partager par ces mots qu’il a prononcé et que j’aime rappeler :

« Celui qui croit en moi vivra, même s’il meurt » Jean 11-25.

Ne plus avoir de cultes, de temps commun pour célébrer notre Seigneur, est un temps éprouvant, même s’il n’est pas forcément ressenti comme tel. C’est aujourd’hui le 7ème dimanche que nous vivons éloignés les uns des autres, tout au moins physiquement. Lorsque nous nous retrouverons un prochain dimanche, comment nous retrouverons-nous ? Comment vivrons-nous ce temps ? Comme avant ? Aurons-nous retenu de ces jours d’éloignement quelque vérité importante et bienfaisante, stimulante pour notre vie et notre communauté ? Notre amour fraternel en sera-t-il renouvelé, enrichi et ce que nous vivrons les uns près des autres en sera-t-il marqué ?

« Que la Parole du Christ habite pleinement en vous et vous enrichisse de toute sorte de sagesse. Instruisez-vous et exhortez-vous (encouragez-vous) les uns les autres, par des psaumes, des hymnes et des cantiques spirituels ; chantez à Dieu de tout votre cœur, avec reconnaissance : Quoi que vous fassiez, en parole ou en œuvre, faites tout au nom du Seigneur Jésus en rendant grâces, par lui, à Dieu notre Père » Colossiens 3-16 et 17.

Je vous dis à bientôt, dans la joie du revoir et dans cette attente, avec Mireille nous vous souhaitons encore dans cette période de distanciation, voire d’un certain sentiment d’isolement, des jours bénis dans la foi et l’espérance qui est en Jésus-Christ.

Bon dimanche. Votre frère dans la foi, et pasteur, François Quoniam.